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Histoire & Patrimoine
#07
L’émetteur-récepteur Morse : la formidable épopée de la télégraphie électrique
RÉSUMÉ > Étudiée dès la fin du 15e siècle, l’électricité est longtemps restée pour le grand public un objet de curiosité et d’amusement avant que soit démontrée son utilité pratique. La maîtrise de l’électricité, grâce à la pile mise au point par Volta, permet de transmettre une information de manière instantanée. Les ingénieurs vont dès lors se lancer dans l’élaboration d’appareils capables de transmettre des messages de manière totalement fiable.

Les premiers télégraphes électriques

      Les premiers appareils de télégraphie électrique apparaissent en 1837. Ce sont des appareils très adaptés à la gestion des lignes de chemin de fer mais ils ont toutefois l’inconvénient d’être lents. Apparaissent ensuite les appareils conçus par Samuel Morse, plus rapides et présentant l’avantage de laisser une trace tangible du message sur une mince bande de papier. Le système est basé sur un code composé de traits et de points correspondant à des impulsions électriques plus ou moins longues et dont le débit s’élève à 25 mots à la minute. Malgré quelques difficultés commerciales, le système Morse ne tardera pas à s’imposer.  

Le télégraphe électrique supplante Chappe

     Le 1er janvier 1839, la première liaison commerciale de télégraphe électrique d’une vingtaine de kilomètres est mise en service dans la banlieue de Londres au profit d’une compagnie de chemins de fer. Outil indispensable à la gestion du trafic ferroviaire, le télégraphe électrique se déploie en Angleterre de manière très rapide.
     En France, l’administration freine le développement du télégraphe de Chappe et il faut attendre 1845 pour que la première ligne Paris-Rouen soit opérationnelle. Le développement du réseau ferroviaire sous l’impulsion de Napoléon III permet de rattraper ce retard par un développement parallèle à celui des voies ferrées. L’ouverture du télégraphe électrique aux usagers privés en 1851 participe à ce développement. L’Etat en garde toutefois le monopole.
     Suite à la volonté de l’Empereur qui assigne au télégraphe la mission première de « porter avec promptitude les ordres du gouvernement sur tout le territoire national », toutes les préfectures sont, en 1855, reliées à Paris par voie électrique. Jusqu’à la déclaration de la guerre en 1870, le réseau télégraphique continue à se développer. Il s’adapte au découpage administratif. En 1862, la décision est prise de créer un réseau cantonal afin d’assurer la pénétration du télégraphe dans les campagnes. Quelques réseaux particuliers complètent le réseau national. Ainsi Paris dispose dès 1854 d’un réseau urbain, et à partir de 1858, un réseau relie les ports français. En Algérie, le télégraphe électrique remplace le télégraphe optique en 1859.

     L’essor rapide des réseaux terrestres conduit au franchissement des mers. Le premier câble télégraphique sous-marin entre le France et l’Angleterre est posé en 1851. Dix ans plus tard, des câbles reliant la Corse au Continent et l’Algérie à la France entrent en service. L’Algérie sera définitivement reliée à la France en 1871.
      En 1866, le plus grand paquebot du monde, le Great Eastern, pose le premier câble transatlantique opérationnel. Malgré plusieurs tentatives infructueuses, cette première liaison télégraphique entre l’ancien continent et le Nouveau monde est vécue comme une véritable aventure technique et industrielle. La France, quant à elle, pose son premier câble transatlantique en 1869 entre Brest et Saint-Pierre-et-Miquelon. L’ère des communications intercontinentales est ouverte.
     Les liaisons internationales seront dominées par les Britanniques pendant plus de 50 ans. Au cours des années 1870-1880, ils sont en effet les premiers à développer, grâce à leur capacité industrielle, un réseau à l’échelle planétaire en s’appuyant sur leurs colonies. Ils comprennent avant les autres l’importance des câbles sous-marins pour une nation qui désire jouer un rôle important dans les relations internationales. La Grande- Bretagne occupe rapidement une position hégémonique que les autres puissances, dont la France, vont tenter de contrebalancer. Les câbles sous-marins représentent alors un enjeu extrêmement important sur le plan géostratégique.

     Une des caractéristiques du réseau de télégraphie électrique est sa mondialisation presque immédiate. Avec le réseau de télégraphie sous-marine, le monde change de dimension : les continents se rapprochent, les données géostratégiques de la planète sont bouleversées. C’est dans ce contexte que naît en 1865 une institution suprême en matière de télécommunications, toujours en place de nos jours, l’Union télégraphique internationale (UTI). Celle-ci définit les premières normes mondiales pour le raccordement des réseaux nationaux et reconnaît le code Morse comme norme universelle.
     Les peuples assistent aussi à ce changement par l’accès à une information internationale de plus en plus instantanée avec, en parallèle au télégraphe, le développement de grandes agences de presse (Associated Press, Havas, Reuter, …).
     Des hommes, des découvertes scientifiques ont imprimé tout au long de l’histoire l’évolution des techniques des communications à distance. L’électricité a sans nul doute été un tournant dont nous bénéficions encore aujourd’hui. Le bond technologique initié par la télégraphie électrique a amorcé celui de la transmission de la parole, la téléphonie. 170 années après l’invention du code Morse celui-ci est encore aujourd’hui utilisé, que ce soit par les armées lors de transmissions dans des conditions difficiles ou par les radio amateurs pour des fins plus ludiques.

La maîtrise de l’information et des communications, tome 1 (Des origines à 1962) et tome 2 (De 1962 à 1989) est édité par l’Association des amis du musée de tradition de l’Arme des transmissions (Aamtat) et diffusé par l’Espace Ferrié – Musée des Transmissions (musee@espaceferrie. fr).

L’Espace Ferrié – Musée des Transmissions, avenue de la Boulais, à Cesson-Sévigné, est ouvert tous les jours de 14 h à 18 h sauf le mardi. Plein tarif : 3 €. Demi-tarif : 1,50 € (étudiants, personnes sans emploi et groupes à partir de 20 personnes). Gratuit pour les mineurs accompagnés, enseignants et personnels défense. Tél. : 02 99 84 32 43.